[France 2 - 31 juillet 2005] Ils ont filme la guerre en couleur : L'Enfer du Pacifique

Pour le quatri=E8me et dernier volet de cette s=E9rie pl=E9biscit=E9e par
le public, Ren=E9-Jean Bouyer, auteur et r=E9alisateur, nous ouvre les
portes d'un Pacifique en couleur et nous le commente.

Ils ont film=E9 la guerre en couleur : L'Enfer du Pacifique
Dimanche 31 juillet =E0 20h50
Documentaire r=E9alis=E9 par Ren=E9-Jean Bouyer
Ecrit par Ren=E9-Jean Bouyer
Texte dit par Andr=E9 Dussollier


> http://contrecourant.france2.fr/cc_histoire_art.php3?id_article=3D292


Roosevelt a l'intuition que pour mobiliser le pays, il doit lui faire
conna=EEtre l'ampleur des sacrifices consentis par ses soldats. Les
plus grands cin=E9astes de Holllywood sont enr=F4l=E9s pour tourner ces
images, les sonoriser, les commenter. Le Pacifique, conflit le plus
largement film=E9 en couleur, de la guerre, ne parle pas que du pass=E9.
Le 11 septembre 2001 a brusquement r=E9veill=E9 le souvenir de Pearl
Harbour et de ce qui s'en est suivi. La guerre du Pacifique, c'est
aussi le choc de deux cultures, de deux mondes dont les mentalit=E9s et
les valeurs sont aux antipodes les unes des autres.

Les Marines
"Les Am=E9ricains ont tourn=E9 beaucoup plus d'images en couleur dans
le Pacifique qu'en Europe. Ce nouveau volet de la s=E9rie, b=E9n=E9ficie
par cons=E9quent d'une mati=E8re encore plus riche que les
pr=E9c=E9dents. Rien qu'en 1945, 5 000 heures de film, ont =E9t=E9
tourn=E9es, par l'arm=E9e. Les images "amateur" de l'arri=E8re, du
"home front" comme on disait =E0 l'=E9poque, sont plus rares. Le
Kodachrome r=E9serv=E9 aux militaires, =E9tait contingent=E9 pour les
civils. Certains, se d=E9brouillent tout de m=EAme pour filmer la vie
quotidienne : les restrictions, le black-out, les femmes en usine ou en
uniforme, Henry Ford, l'=E9pave du Normandie, etc."

Chasseurs de l'a=E9ronavale am=E9ricaine
"A cette =E9poque, les avions de chasse =E9taient =E9quip=E9s d'une
cin=E9mitrailleuse. Cette cam=E9ra tournait d=E8s que le pilote
d=E9clenchait un tir. Elle permettait d'enregistrer et d'homologuer
les =E9ventuelles "victoires" du pilote lors d'un combat. Ces films
=E9taient en couleur, il en existe des milliers et des milliers de
bobines entass=E9es dans les archives. Pas n=E9cessairement passionnants,
mais il faut visionner =E9norm=E9ment de bobines pour esp=E9rer d=E9couvrir
un document rare. C'est dans une cin=E9math=E8que de l'Am=E9rique
profonde, parmi des bizarreries compil=E9es sous le titre Unusual
occupations, que Polly, ma documentaliste am=E9ricaine, a d=E9couvert des
images sur les femmes pilotes au service de l' US Air Force en 1944.
La chose peut para=EEtre commune aujourd'hui, mais il fallait un
sacr=E9 courage =E0 l'=E9poque. Trente-huit de ces pilotes sont mortes
lors d'accidents, car la s=E9curit=E9 a=E9rienne n'avait rien =E0 voir
avec ce qu'elle est devenue. Ces documentaires sont minutieux =E0
=E9crire et =E0 construire : il faut rendre une identit=E9 =E0 toutes ces
images, beaucoup sont anonymes, d=E9crypter quelques mots =E9nigmatiques
sur une bo=EEte rouill=E9e, leur trouver une place dans le r=E9cit et
surtout v=E9rifier sans cesse les dates. Les nouveaux mod=E8les d'avion
changeaient par exemple, tous les six ou huit mois, d'aspect. Les
faire voler avant serait un anachronisme. Il faut aussi s'entourer
d'excellents conseillers historiques."

Avant un d=E9barquement dans le pacifique
"La majeure partie de ces films a =E9t=E9 r=E9alis=E9e par, l'US Navy et
les Marines. Pendant trois ans, ils ont progress=E9 vers le Japon en
s'emparant d'une =EEle apr=E8s l'autre. Les images des assauts =E0
Tarawa, Sa=EFpan, ou Iwo jima sont des documents exceptionnels, tant du
point de vue de la qualit=E9 des images que de la couverture
"journalistique". En revanche, l'arm=E9e de terre, les G.I's. que
commandait Mac Arthur, ceux qui ont repris la Nouvelle Guin=E9e, les
Philippines, n'ont pratiquement jamais tourn=E9 en couleur. Ces images
manquent au r=E9cit mais elles n'existent pas... Malheureusement,
lorsqu'on choisit de montrer la guerre en couleur, on ne peut pas
toujours d=E9rouler le fil de l'Histoire en continu."

Immersion d'un marin am=E9ricain
"Avant 1943, les journaux avaient interdiction de montrer des morts
am=E9ricains. Roosevelt, prenant exemple sur Churchill qui avait promis
"du sang, de la sueur et des larmes" aux Anglais, autorise la presse =E0
publier des photos de cadavres dans le but de mobiliser les civils.
Pourtant, dans le m=EAme temps, on recrute des conseillers en
communication, ils filtrent les images tourn=E9es sur le front, ils
retiennent celles qui sont trop brutales, c'est ce qu'ils appellent
: "montrer une r=E9alit=E9 restreinte". Dans ces films, on voit par
exemple, des bless=E9s, mais ils sont toujours imm=E9diatement secourus,
on ne montre jamais ceux qui agonisent entre les lignes ennemies."

Pearl Harbor 7 d=E9cembre 1941
"L'attaque surprise sur Pearl Harbor, n'ayant pas =E9t=E9 film=E9e en
couleur, la Navy a demand=E9 =E0 John Ford de la reconstituer. Le
r=E9sultat sonne faux et le g=E9n=E9ral Marshall, chef de l'Etat-major,
d=E9cide de retirer ce film de la circulation (il n'a =E9t=E9 visible
qu'=E0 partir de 1990). Roosevelt craint les r=E9actions d'un public,
qui, en 1941, sait parfaitement distinguer une image de cin=E9ma d'une
image de reportage. (Celles que nous avons utilis=E9es proviennent des
rushes, non mont=E9s, du film). D'autres grands cin=E9astes ont film=E9
la guerre, William Wyler, Raoul Walsh, Frank Capra. Dans le Pacifique,
John Ford =E9tait le chef du service cin=E9matographique de la Navy. Il a
d'ailleurs perdu un =9Cil en filmant la bataille de Midway.On a
beaucoup dit que cette attaque surprise de Pearl Harbor avait des
points communs avec le 11 septembre, c'est vrai, mais le
rapprochement entre la guerre du Pacifique et celle d'Irak va plus
loin. C'est le choc de deux cultures, de deux mondes dont les
mentalit=E9s et les valeurs sont aux antipodes les unes des autres, de
deux imp=E9rialismes aussi. D'un c=F4t=E9, la croyance dans la nation et
l'empereur Dieu, le d=E9dain de la mort, les kamikazes, de l'autre
la foi dans la d=E9mocratie, l'individu, et la puissance nucl=E9aire."

Marines sur une p=E9niche de d=E9barquement =E0 Iwo-Jima
"Aux USA, la propagande =E9tait tout de m=EAme moins pesante que dans les
pays totalitaires. Les films se contentaient d'inciter d'une
mani=E8re plus ou moins subtile, =E0 acheter des emprunts, =E0 rejoindre
telle ou telle arme, =E0 soutenir l'effort de guerre par ses
sacrifices. On joue avant tout sur la fibre patriotique. Les cin=E9mas
devaient diffuser 30 minutes de documentaire estampill=E9 U.S. Army par
jour et dans tous les films produits =E0 l'=E9poque, comme Guadalcanal,
on retrouvait le bon gars du Middle West, celui de Brooklyn, toutes ces
figures auxquelles un Am=E9ricain pouvait s'identifier."

Civile japonaise recueillie par les soldats am=E9ricains apr=E8s la
bataille - Okinawa
"L'arm=E9e japonaise =E9tait parvenue =E0 convaincre les civils qu'il
valait mieux se suicider que tomber aux mains des Am=E9ricains. Des
familles enti=E8res se sont jet=E9es du haut des falaises =E0 Sa=EFpan. A
Okinawa, un habitant sur cinq est mort. Je n'aime pas le mot
d'autocensure, mais je n'aime pas non plus le voyeurisme. Par
exemple, =E0 Hiroshima, j'ai visionn=E9 des centaines de m=E8tres
insoutenables, en particulier des grands br=FBl=E9s. Il =E9tait inutile de
se complaire longuement dans ces images, une maman victime avec son
b=E9b=E9 t=E9moignent suffisamment de l'atrocit=E9 de ce moment
apocalyptique.Il est tout aussi fort, de montrer les images de
centaines de casques de morts empil=E9s, que des cadavres ensanglant=E9s.
Notre sensibilit=E9 aux images est diff=E9rente de celle de l'=E9poque.
On peut laisser une part d'imagination au spectateur, l'=E9cho est
toujours plus impressionnant que le bruit direct." Le 2 septembre 1945,
Ministre des affaires =E9trang=E8res japonais sur le Missouri. "Le 2
septembre 1945, en baie de Tokyo, sur le cuirass=E9 Missouri, MacArthur
parraine la c=E9r=E9monie de reddition inconditionnelle de l'empire du
Soleil Levant.Le ministre japonais des Affaires =E9trang=E8res et le
g=E9n=E9ral Umezu signent l'acte officiel. Aux c=F4t=E9s de tous les
g=E9n=E9raux alli=E9s, le g=E9n=E9ral Leclerc signera =E0 son tour. La Fran=
ce
libre avait d=E9clar=E9 la guerre au Japon d=E8s l'attaque de Pearl
Harbor."

Soldats am=E9ricains dans la jungle
"Souvent les photographes se prenaient en photo entre eux, c'est le
cas ici. Ils se servaient en g=E9n=E9ral de Speed Graphic, ces gros
appareils carr=E9s. Concernant les cameramen, ils utilisaient du film 16
mm Kodachrome, transf=E9r=E9 plus tard, en 35 mm Technicolor pour
diffusion en salles. Les images de l'Enfer du Pacifique sont =E0 80 %
issues de rushes en 16 mm. Leur qualit=E9 est excellente. Mais quelque
20 % =E9taient en 35 mm et parfois leurs couleurs avaient vir=E9, les
bleus avaient disparu au profit du rouge. Nous les avons
r=E9=E9quilibr=E9es =E0 l'=E9talonnage, en revanche les rayures c=F4t=E9
g=E9latine, sont irrattrapables. J'ai parfois =E9t=E9 contraint de
renoncer =E0 une sc=E8ne pour conserver une unit=E9 de qualit=E9 globale au
montage. Exception faite pour ce bless=E9 d=E9sarticul=E9 =E0 Tarawa, mais
la force de cette image, m=EAme floue, =E9tait trop grande pour
l'=E9carter. De toutes fa=E7ons, dans ce genre de documentaire,
l'int=E9r=EAt du film ne se fonde qu'accessoirement sur la qualit=E9
de conservation des archives."

Japonais sur jonque
"Au lendemain d'Hiroshima, Staline a d=E9clar=E9 la guerre au Japon.
Certaines images, comme celles de l'arm=E9e japonaise envahissant la
Chine, ou Tokyo apr=E8s la d=E9faite, ont =E9t=E9 r=E9cup=E9r=E9es en Russi=
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