Back to the roots

Neuf ans. Cela fait neuf ans que j’ai rédigé le test de Persona 3, premier spin-off de la licence Shin Megami Tensei à sortir en Europe. Un jeu mémorable pour les fans de RPG japonais qui dispose encore aujourd’hui d’une aura bien particulière. Après avoir également mis les mains sur Persona 4 l’année suivante, les choses se confirmaient : Atlus sait nous proposer des jeux de qualité, au profit d’une franchisée née au début des années 90. Après un passage à vide pour ce spin-off – ainsi que la sortie d’un jeu de baston et d’un jeu de rythme – le développeur japonais nous livre enfin ce fameux Persona 5 que nous attendions tant. C’est donc avec quelques cheveux blancs gagnés au fil des années que j’insère fébrilement la galette dans le lecteur de ma PS4, à l’idée de passer de nouvelles dizaines d’heures à jongler entre deux cycles : la vie étudiante et ses relations sociales, ainsi que les affrontements dans des dédales plus ou moins tortueux quand l’occasion se présente. Voilà de quoi réveiller un potentiel petit trip nostalgique.

Pour les inconditionnels de Persona, ce cinquième épisode ne brisera pas les codes instaurés depuis les volets sortis sur PlayStation première du nom et maintenus dans le cadre des volets PS2. Il sera question de débuter dans la peau d’un héros – que nous devrons baptiser et qui se montrera à nouveau muet tout au long de la partie – qui infiltre un palace, avec comme objectif de commettre un cambriolage derrière un masque digne d’un Arsène Lupin. Toutefois, la mission échoue et, après un passage à tabac par la police locale, nous nous retrouvons dans une salle d’interrogatoire face à une inspectrice bien décidée à nous faire cracher le morceau. L’aventure se compose donc de flashbacks basés sur les propos relatés par notre protagoniste principal. Ainsi, nous apprenons qu’il a été préalablement jugé pour un crime qu’il n’a pas commis, en souhaitant venir en aide à une femme aux mains d’un type louche et alcoolisé. Notre jeune homme se verra alors expatrier à Tokyo et vivre dans le grenier d’un bar vintage d’un petit quartier. Accueilli avec méfiance par le tenancier du bar et par l’ensemble du corps enseignant et des élèves de son nouveau lycée, il devra faire sa place pour continuer à vivre sa jeunesse.

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Rapidement, nous ferons face à des problèmes internes à l’école, notamment entre les enseignants et les étudiants. Des choses surnaturelles commencent alors à se produire, notamment une étrange application sur notre smartphone qu’il est impossible à supprimer et qui finit par nous transporter dans un univers parallèle qui prend la forme d’un palace. Avec ses premiers camarades de fortune, notre héros devra errer dans le dédale de ce palace, rencontrant d’étranges ennemis et un personnage central de ce lieu qui fera curieusement penser à un protagoniste du monde réel. Et pour cause, le lieu matérialise le coeur de cette personne, son esprit torturé. C’est dans cette réalité cauchemardesque que nous réveillerons notre capacité à l’usage d’une première Persona, une créature qui nous aidera à combattre le mal. Les camarades qui nous suivront dans cette aventure sont eux aussi des « élus » qui pourront utiliser une Persona. Voilà le début d’une histoire intéressante qui se basera sur la découverte de personnes torturées qu’il conviendra d’affronter dans cette réalité alternative et ce, dans l’optique d’une incidence dans le monde réel : excuses et aveux publics afin d’arrêter de nuire, etc. À terme, cela permettra de lever le voile sur les raisons de l'échec de cette dernière mission.

Comme ses aînés, Persona 5 propose une progression en deux temps. D’un côté, la vie étudiante dans laquelle il sera question d’aller en cours, étudier, échanger avec d’autres élèves, se balader dans les différents quartiers de la ville, dégotter un job. D’un autre côté, la découverte et l’exploration de palaces labyrinthiques destinés à faire avancer l’histoire. Dans ce cas de figure, nous nous retrouvons dans une sorte de dungeon crawler, plus évolué que dans Persona 3 et Persona 4 malgré tout. Les combats au tour par tour se dérouleront que dans cette phase de jeu, l’autre versant étant purement narratif. Pour les nouveaux venus dans la franchise, il n’est absolument pas demandé d’avoir joué aux précédents opus pour comprendre celui-ci. De plus, c’est l’occasion de découvrir un titre aux mécaniques pas communes et nous laissant la possibilité de gérer notre emploi du temps comme bon nous semble, suivant un calendrier précis. Toutefois, il est utile de préciser que, à l’instar des anciens opus, les premières heures de jeu sont aiguillées et la liberté d’action se veut quasi-inexistante. Passé ce cap plutôt frustrant, les possibilités sont bien plus intéressantes, quand bien même la liberté n’est pas totale : le rayon d’action s’arrête à quelques quartiers de la capitale nipponne et certains lieux (bâtiments, etc ) ne sont pas accessibles.

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Persona non grata

Cette progression en deux temps fonctionne toujours aussi bien que dans les précédents épisodes. Ainsi, toute la partie narrative et scolaire permet de s’attacher aux personnages, assurant un capital sympathie de plus en plus important au niveau du background. Si la répétition des journées de cours peut sembler barbante, les possibilités laissées en fin de journée sont de plus en plus variées au fil des heures de jeu. Les lieux accessibles se veulent plus nombreux, les personnes côtoyées veulent nous voir pour se faire une bouffe, aller un ciné, prendre un verre ou encore simplement se balader dans des quartiers prévus à cet usage. Il convient également d’étudier pour faire face aux exams à venir et ainsi gagner en connaissance et faire grimper nos statistiques sociales. Ces dernières se composent également du courage, de la gentillesse, de la maîtrise et du charme. Ces traits permettent par ailleurs de parler à certaines personnes ou de gagner en efficacité dans certaines situations. Diverses actions peuvent accentuer nos traits et cela passe souvent par des activités annexes telles que les bains publics, le baseball ou encore les salles d’arcade. Voilà de quoi occuper allègrement nos fin de journée et soirées. Les échanges avec les PNJ du jeu ont un intérêt puisque cela permet de tailler des affinités entre les Persona. En effet, cela occasionne des atouts dans le monde alternatif, permettant de gagner des compétences ou des habiletés supplémentaires. Vous l’aurez compris, la vie « normale » permet de se préparer à l’autre versant du jeu, davantage axé sur l’exploration et les combats.

Lorsque l’occasion se présente, vous pourrez vous lancer dans l’invasion d’un palace ou du Mementos – un énorme dédale labyrinthique qui s’ouvrira au fil du temps – afin de combattre des Persona et d’y libérer des âmes en peine. Les créatures sont toujours bien imaginées et relativement variées. Dans le cadre de combats au tour par tour, il conviendra d’en affronter et les exterminer en trouvant leurs points faibles. Ainsi, chaque nouvel ennemi rencontré nécessitera de dégotter ses faiblesses élémentaires et ce, dans l’optique de renforcer les chances de victoire. En effet, une faiblesse met l’ennemi à terre et permet d’effectuer une attaque supplémentaire. Ainsi, il est possible d’enchaîner les attaques selon les sensibilités des ennemis et ne pas laisser à ces derniers le choix de riposter. Si tous les ennemis sont à terre suite à des coups critiques, il est alors possible de faire un « hold-up », permettant plusieurs choix : effectuer une attaque finale de groupe ou négocier avec l’ennemi. Dans ce cas de figure, une série de choix est présentée, visuant à séduire l’ennemi afin de le recruter ou lui demander un objet, voire de l’argent. Cette phase est particulièrement intéressante, mettant à l’honneur le soin apporté par les développeurs à travailler le background des adversaires.

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Outre le fait de pouvoir recruter des Persona, les fans de la série seront ravis d’apprendre qu’il sera toujours possible de les fusionner par l’intermédiaire de la fameuse Velvet Room. Cette pièce, tenue par un Igor aussi mystérieux que flippant, permet de sacrifier votre Persona sur une guillotine et de la fusionner à une ou deux autres afin de résulter sur une créature encore plus puissante. C’est sur ce point précis que les affinités travaillées avec les PNJ du monde réel sont importantes, puisqu’elles permettent de booster les caractéristiques et l’expérience des nouvelles Persona crées, offrant dans un même temps l'héritage de certaines compétences des anciennes créatures dans la fusion. Cet aspect du jeu formait déjà un grand intérêt dans les précédents épisodes et fait son retour dans les règles. Cette Velvet Room est accessible à tout moment à l’entrée de chaque palace, mais aussi dans le monde réel, offrant ainsi la possibilité de paramétrer nos Persona à tout moment.

Dans les dédales, les déplacements sont libres et permettent d’appréhender les ennemis à distance. Il est ainsi possible d’opter pour la discrétion afin de les attaquer par surprise et, ainsi, bénéficier d’un avantage lors de l’amorce du combat. Dans le cas contraire, l’ennemi peut nous prendre par surprise et nous asséner des dégâts en priorité. Les différents couloirs à arpenter sont de toute façon conçus pour afficher des décors derrière lesquels il est possible de s’y dissimuler, quand bien même les déplacements ne sont pas toujours très précis. On appréciera toutefois le fait que les palaces ne sont plus aléatoires, permettant ainsi de mieux nous repérer et revenir à certains endroits pour en découvrir certains couloirs et autres coffres à trésors.

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Nice shot

À l’instar de ses aînés, Persona 5 propose un déroulement et des mécaniques de jeu bien à lui, assurant ainsi une grande originalité dans le domaine du RPG japonais. Outre son gameplay, le titre jouit d’une réalisation esthétique de grande qualité. S’il est clair que le soft n’est techniquement pas à la hauteur de la concurrence, Atlus s’est focalisé sur une patte artistique bien léchée. En conséquence, le titre propose de nombreuses phases animées du plus bel effet, mais aussi et surtout une interface très originale, mettant à l’honneur des artworks de grande qualité, ainsi que des animations très soignées. En clair, le soft dispose d’une forte identité visuelle et ce, jusque dans les moindres détails. Des animations suite à une « All-Out Attack » jusqu’aux transitions dans les métros, rien n’est laissé au hasard et assure une grande immersion.

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Persona 5

Le RPG d'Atlus, dans sa version PS3.

44.99€ sur Amazon* * Prix initial : 44.99€.

La partie sonore n’est évidemment pas en reste avec des thèmes toujours signés par le compositeur japonais Shoji Meguro, lequel s’est déjà illustré sur Persona 3 et 4. En conséquence, il s’agit toujours de morceaux très jazzy lors de la vie scolaire et de piste plus dynamiques lors des combats, collant parfaitement au rythme du jeu. Les doublages sont en anglais, avec la possibilité de télécharger gratuitement les voix japonaises sur le PlayStation Store. Dans les deux cas, le travail se révèle de qualité. Précisons dans un même temps que les sous-titres sont uniquement disponibles en anglais. Si le titre se veut plutôt bavard, la compréhension n’est clairement pas difficile.

Un mot enfin sur la durée de vie qui n’entache en aucun cas celle des précédents volets. En effet, Persona 5 dépasse allègrement les 60 heures de jeu, au vu de tout ce qu’il y a à faire au niveau de la trame principale, des quêtes annexes et autres Persona à récolter pour finaliser le compendium. En bref, les fans de jeux de rôle en auront pour leur argent.

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+ Les plus

  • Scénario attractif
  • Narration de qualité
  • Mécaniques de jeu réussies
  • Système de combat bien pensé
  • Esthétique folle
  • Superbe réalisation sonore
  • Grosse durée de vie

- Les moins

  • Peu de liberté lors des premières heures de jeu
  • Quelques imprécisions des déplacements
  • Héros muet